Le quatrième inscrit à la réunion du mercredi de Freud fut un jeune psychiatre Viennois, Paul Federn. Alors que Carl Jung autre inscrit, s’est passionné pour l’exploration des profondeurs de l’inconscient, Federn lui va se passionner pour l’exploration du "Moi".
En étroite collaboration avec Freud pendant 35 ans, il finalise son travail dans les années 40 et il est publié post-mortem en 1952.
Sa "Psychologie du Moi" est basée sur des descriptions précises des expériences subjectives recueillies à la fois auprès de patients psychiatriques et de personnes ordinaires.
Pour Federn le "Moi" est une expérience subjective et correspond au sentiment d’unité, de continuité et de causalité, dans notre vie.
Federn a appliqué le terme "sentiment du Moi" uniquement aux expériences opposées à la réalité extérieure et donc perçuse comme participant à l’unité cohérente du "Moi".
Le "Moi" actif est vécu dans la planification, la pensée et l’action et, dans sa forme plus élémentaire, dans le phénomène de l’attention.
Si, une personne saine d’esprit dirige son attention simultanément à l’intérieur et à l’extérieur de son esprit, elle sent clairement ce qui n’est que sa pensée, sa mémoire ou son imagination et ce qui est un objet ou un événement réel du monde extérieur.
Federn met l’accent sur la flexibilité des limites du Moi, qui subissent des changements progressifs dès la naissance. A diverses périodes correspondent des contenus variés. Certaines modifications des limites du "Moi" se produisent dans différentes situations de la vie quotidienne. Malgré ces changements, le "Moi" constitue une continuité qui lutte pour établir et maintenir, dans chaque état, sa cohérence et son intégrité.
A différentes frontières du "Moi" correspondent différents "états du Moi". L’existence d’une répression des "états du Moi" est l’une des conclusions les plus importantes de Federn. Il peut être prouvé expérimentalement qu’un ancien "état du Moi" ne disparaît pas, mais qu’il est seulement réprimé. En hypnose, un ancien "état du Moi" contenant les dispositions émotionnelles, les souvenirs et les pulsions correspondantes peut être réveillé chez l’individu.
Selon Federn, la partie inconsciente du "Moi" consiste en la stratification des "états du Moi" réprimés. Des personnalités doubles et multiples, ainsi que le somnambulisme, s’ensuivent lorsque différents "états du Moi" sont alternativement réveillés.
Plus le "Moi" s’identifie à certains états, plus la structure du "Moi" s’épuise. Par conséquent, des identifications trop nombreuses et trop fortes peuvent entraîner une faiblesse du "Moi". Cette faiblesse est à la source de nombreux problèmes existentiels et psychologiques.
La semaine dernière nous avons parlé de kurt Lewin et des lieux psychiques ou états internes de la personne. Vous voyez que les états internes de Lewin ressemblent énormément aux "Etats du Moi" de Paul Federn. Et les caractéristiques de porosité, déplacement et transformation de Lewin peuvent s’appliquer aux "Etats du Moi".
Mais plus intéressant encore, regardons ensemble l’équation de Lewin : C = f(E,M) où C est le comportent de la personne, E est l’environnement ou le contexte et M l’état du moi ou état interne. On peut s’apercevoir que l’environnement appartient à notre extériorité, nous n’avons que peu d’action ou d’influence sur lui. Dans les faits les "États du Moi" sont la seule variable d’ajustement à notre disposition, facile à actionner. Sauf si le "Moi" est affaibli et à ce moment là, il n’aura plus la possibilité d’avoir les comportements adéquats sous la dictature d’un contexte oppressant.
Nous y reviendrons.
Si on considère que les "états du Moi" des âges antérieurs continuent d’exister, même s’ils sont réprimés, on s’aperçoit que probablement l’Archétype de Jung : l’Enfant Intérieur en est le dépositaire. Mais il y a une énorme différence entre un enfant de 2 ans et un enfant de 10 ans. Ne croyez-vous pas qu’il faudrait parler DES Enfants Intérieurs ?
Le moment est venu d’aborder le travail de Jean Piaget, que nous ne pouvons plus ignorer.
La contribution essentielle de Piaget à la connaissance a été de montrer que l’enfant a des modes de pensée spécifiques qui le distinguent entièrement de l’adulte.
Il a passé 35 ans de sa vie, de 1920 à 1955, à étudier et à mettre en forme ses observations réalisées dans le monde entier auprès d’enfants de dizaines de cultures différentes.
Il a trouvé une structure commune d’acquisation des aptitudes et des connaissances.
Selon Piaget, l’origine de la pensée humaine n’est pas la simple sensation, elle n’est pas non plus un élément inné. Elle se construit progressivement lorsque l’individu, et en particulier l’enfant, entre en contact avec le monde. Grâce à ces contacts répétés l’enfant développe des unités élémentaires de l’activité intellectuelle, appelés schèmes.
Ces schèmes s’ancrent dans l’esprit, lorsque l’expérience les conforte, ou se modifient lorsqu’ils sont contredits par les faits.
Piaget divise le développement psychologique de l’enfant en plusieurs périodes, chacune elle-même divisée en stades, conditionnant le suivant. Les différents moments du développement sont :
1. La période de l’intelligence sensorimotrice (de la naissance à 2 ans), divisée en 6 stades.
Des réflexes innés à l’apprentissage du mouvement et au début des tests de réalité.
2. La période de l’intelligence préopératoire (de 2 à 6 ans), divisée en 2 stades.
La pensée symbolique avec l’acquisition du langage et la pensée animiste qui prête des intentions humaines aux objets.
La pensée intuitive ou la distinction entre intérieur et extérieure s’opère, le "Moi" se forme.
3. La période des opérations concrètes ou de l’intelligence opératoire (de 6 à 12 ans).
Acquisition de la lecture, de l’écriture et du calcul. Le "Moi" est formé et ses frontières sont claires, l’autre devient un alter ego, c’est le début de la socialisation.
4. La période des opérations formelles (de 12 à 16 ans).
Le passage du concret à l’abstrait (apprentissage de l’algèbre), le passage du réel au possible, la prévision des conséquences à long terme, la logique déductive et la résolution systématique des problèmes.
L’œuvre de Piaget est diffusée dans le monde entier et continue à inspirer des travaux dans des domaines aussi variés que la psychologie, la sociologie, l’éducation, l’épistémologie, l’économie et le droit.
Voilà c’est tout pour aujourd’hui. Ah une petite question. Qui a dit à Freud après avoir assisté à une de ses conférences ? :
« Ce que vous faites est très intéressant
mais moi je commence là où vous vous arrêtez »
C’est le premier développeur que nous aborderons la semaine prochaine.
Merci de m’avoir regardé jusqu’ici et à très bientôt.
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