Une petite pause de consolidation de tout ce que nous avons vu jusqu’ici.
Dès le 19e siècle, il a été évident pour tout le monde de la non unité de la conscience. Pierre Janet parlera de personnalité seconde, tierce, etc, Max Dessoir inventera le mot dipsychisme, Freud simplifiera en inconscient, préconscient et conscient dans la première topique.
Vous vous rappelez que le mot topique se rapporte aux lieux comme dans topo-graphie ou topo-nymie et lorsque l’on parle de topique, on parle de lieux psychiques.
Évidemment, ce ne sont pas de vrais lieux mais des lieux virtuels dans le psychisme de chacun.
La topique de Jung développe l’inconscient et sa représentation devient un cône à 5 étages. Assagioli complète la topique de Jung en la transformant en un œuf comprenant 6 espaces ou lieux psychiques différents baignant dans un 7e lieu, l’inconscient collectif.
La seconde topique de Freud sera aussi en 3 parties le ça, le moi et le surmoi. On voit donc apparaître 3 systèmes différents de représentation du psychisme. Si on les examine de près, on s’aperçoit qu’ils partagent tous le concept de l’existence d’un moi. En conservant aussi la première topique de Freud, ces différents systèmes s’accordent sur la présence d’un moi et d’un inconscient. Freud reste assez minimaliste, Jung développe les différents inconscients et Assagioli développe le moi.
Tous ceux qui vont les suivre vont généralement se rattacher à un des trois systèmes.
Vous vous rappelez de Kurt Lewin et de sa « Psychologie Topologique » dans laquelle il développe la nature des lieux psychiques. En fait, il les appelle des régions et des sous-régions selon leurs subdivisions. Il étudie leur localisation relative : sont-elles en contact ? sont-elles éloignées ? les frontières sont-elles souples et poreuses ? ou bien sont-elles rigides et étanches ? En fait à chaque situation de la vie, correspond une région psychologique.
Si vous êtes au travail très concentré sur votre tâche, vous êtes dans une région psychologique très différente que lorsque vous êtes en famille en train de discuter des activités du prochain week-end ou que lorsque vous êtes en train de prendre un verre dans un bar avec des amis. Parfois des souvenirs ou des préoccupations d’une autre région peuvent se manifester comme parler de votre week-end à vos amis ou raconter une histoire de boulot à la maison. Mais parfois les situations sont tellement éloignées les unes des autres que les régions psychiques ne communiquent pas entre elles.
La grande découverte de Kurt Lewin concerne l’interaction ou l’interdépendance entre le comportement, l’environnement et la région psychique dans laquelle vous vous trouvez. Il s’agit d’un espace particulier ou champ dans lequel votre comportement est conditionné par l’environnement dans lequel vous êtes (professionnel, familial, amical ou autre) ainsi que par la région psychique dans laquelle vous vous trouvez.
Notre espace psychologique est ainsi fragmenté en régions et sous régions selon les états internes que nous traversons, nos humeurs, nos émotions, nos désirs, nos projets, nos préoccupations.
Pour Paul Federn, le moi se définit par les caractéristiques suivantes :
À la lumière des travaux de Kurt Lewin, il est facile d’en conclure que les États du Moi tels que définis par Paul Federn peuvent être représentées par des régions psychiques de Kurt Lewin.
Nos comportements dans les différentes situations dans lesquelles nous évoluons, dépendent à la fois de nos états interne ou états du moi et de l’environnement. Selon les cas il sera facile d’adopter le comportement adéquat dans une situation donnée si notre moi est capable d’adopter l’attitude ou l’état interne correspondant.
Si la situation, l’environnement ou le contexte sont difficiles, il sera plus compliqué voire impossible d’avoir l’attitude adéquate pour réagir au mieux. De même si le moi est affaibli, il aura du mal à s’adapter et manquera de capacité de réponse ou responsabilité.
La relation entre l’environnement et l’état du moi, est donc asymétrique. L’environnement ou le contexte l’emporteront toujours. Tout affaiblissement du moi restreindra notre capacité d’adaptation ou responsabilité.
C’est pourquoi, Jakob Moreno, fait rejouer dans le Psychodrame, les situations problématiques, en proposant des rôles de personnages réels faisant partie de l’environnement de la personne. Il fait aussi jouer des rôles virtuels correspondants à des états internes ou états du moi différents de la personne.
Tout ceci pour faire émerger des scénarios alternatifs grâce à une forme de créativité collective et une prise en charge par le groupe, donc dans un contexte spécifique différent du contexte d’origine. Contexte qui pouvait être paralysant ou oppressant pour la personne.
Ainsi en toute sécurité, la personne peut entrevoir et imaginer des solutions nouvelles, ce qui vient modifier et assouplir les frontières de ses lieux psychiques ou états du moi.
Fritz Perls sera influencé par le travail de Jakob Moreno et il adaptera avec beaucoup de succès sa technique de la chaise vide. Il sera aussi très influencé par Kurt Lewin d’abord et Paul Federn ensuite.
Il va adopter une conception du moi assez similaire à celle de Paul Federn et il va reprendre l’idée des lieux psychiques de Kurt Lewin en les symbolisant par la fameuse chaise vide. De plus il va introduire la notion de frontière/contact qui indique que la frontière du moi est aussi la zone de contact avec l’extérieur.
Cette zone de contact est aussi la zone de contact relationnelle avec les autres et donc la zone de contact social. Ainsi la Gestalt va adopter la théorie des champs en considérant que la personne fait partie d’un champ de forces psycho-sociales incluant la personne, son environnement et les autres acteurs de la situation.
Le rôle des psychothérapies dissociatives ou dialogiques est de permettre l’adaptation des personnes à l’environnement dans lequel elles évoluent ou bien de choisir un nouvel environnement plus propice à leur épanouissement.
Vous pouvez constater par vous-même la forme d’unité qui s’est construite entre ces différentes personnes pour que s’élaborent les premières approches dissociatives.